RENAULT : Rien de nouveau...
RENAULT : Rien de nouveau…..
Dans le passé, Renault s’est démarqué de ses concurrents en proposant des produits innovants qui ont marqué l’histoire automobile: 4 cv, R4, R16, R5, R8 Gordini, R25, Espace, Twingo, Scenic, Kangoo. Chez quelques concurrents aussi, certains modèles ont bousculé le marché: Ford T, Citroën « Traction », 2 cv, DS, Austin Mini, Range Rover. On le voit, Citroën était une marque innovante mais en perdant son indépendance, elle a perdu sa créativité….On constate hélas, la même funeste tendance chez Renault: Scenic, son dernier produit ambitieux a été lancé en 1995 et, depuis que Renault a réalisé cette alliance avec Nissan, on reste bien sage, à chercher des synergies! En 2008, le couple Ghosn-Pelata a voulu relancer l’innovation à grand renfort d’intox avec la voiture électrique mais le public ne s’y est pas laissé prendre, car quoi de vraiment nouveau dans une Zoé? Moins de nuisances environnementales certes mais à un prix supérieur de 30% environ qui l’écarte des volumes de masse revendiqués malgré l’apport artificiel de la subvention de l’Etat et la pression médiatique bien-pensante.
Et pourtant, sous la pression de l’histoire, le public, le marché, continuent d’attendre plus d’innovation de Renault que de ses concurrents d’où, un certain désamour, amplifié par la passivité d’une direction commerciale trop habituée à la facilité. En effet si les produits actuels de la marque ont perdu en originalité, ils ne sont pas plus moches ni plus mauvais que leurs concurrents directs; difficile de comprendre pourquoi Ford, par exemple, vend 3 fois plus de Mondeo que Renault de Talisman, ou plus grave encore presque 2 fois plus de Focus que de Mégane, ancienne « vache à lait » de Billancourt (chiffres ventes Europe 2019). Depuis 20 ans la marque Renault a perdu progressivement 4,3 points de part de marché en Europe (de 11% en 1999 à 6,7% en 2019), soit plus de 600.000 ventes par an, soit la capacité de 3 usines! Pas étonnant que dans ces conditions, ses usines soient sous engagées et que leurs coûts fixes soient mal amortis! D’où le constat de sureffectifs; et si on se résout à un vaste programme de suppression de postes, c’est qu’on a renoncé à reconquérir ces positions perdues, sans véritable débat sur le sujet….Mais quand la DG par interim et directrice financière invoque la folle course aux volumes de M.Ghosn pour expliquer cette situation c’est une justification très douteuse car ça n’a rien à voir avec la situation des usines de Douai , Flins ou Maubeuge. L’élargissement incontrôlé du groupe Renault s’est opéré essentiellement par conquête externe, réussie pour Dacia, très discutable pour Renault Samsung Motors, à hauts risques pour Lada et incohérente pour Jinbeï&Huason sinon pour décrocher la timbale de PREMIER Groupe automobile du monde! Mais personne ne s’est préoccupé de l’affaiblissement progressif de la maison-mère, Renault, sur son marché domestique l’Europe!
La semaine dernière, ont été communiquées 2 importantes « nouvelles »!
Le 27 mai : L’Alliance a révélé son « Nouveau Business Model »; sous ce terme ronflant, on a du mal à trouver quoi que ce soit de rassurant pour Renault, ni de vraiment nouveau, sinon la notion de « leader-follower » qui ne fait qu’entériner une situation subie où Renault, actionnaire de référence de Nissan avec 43% des parts n’est, en fait, que son « follower »…
On se répartit les marchés:
A Nissan : Japon, Amérique du nord, Chine, soit environ 65% du marché mondial… la Chine expliquant à elle seule la différence d’activités entre Nissan (1.500.000 ventes) et le groupe Renault!
A Renault : Europe, Amérique du Sud, Russie et Afrique du Nord, soit environ 20% du marché mondial…Sachant que l’Europe est le marché le plus disputé au monde ( au point que GM l’a abandonné et que Ford s’apprête à en faire autant!) et le plus exigeant en termes de normes environnementales; d’où la difficulté d’y dégager des marges suffisantes. Le reste des territoires attribués au français est notoirement instable politiquement et socialement, donc à hauts risques…
Bizarrement, l’Inde où Renault a investi lourdement ces dernières années n’est pas mentionnée, ni la Corée dont la justification pour Renault est encore plus discutable quand on renonce à la Chine.
On se répartit la gamme produit:
C’est assez simple: à Nissan, la gamme haute, sans aucune précision sur sa marque Infiniti dont la décrépitude en dit long sur le crédit de Nissan en premium….
à Renault,la gamme basse … avec les perspectives de marges qui vont avec!
Rien de nouveau, tout cela n’est que la triste confirmation de la situation respective des deux entreprises après 20 ans de management de M.Ghosn et ses empressés collaborateurs directs!
Le 29 mai: Renault a révélé son « Projet de Plan de réduction des coûts fixes de plus de 2 milliards d’euros sur trois ans »
La Bourse attendait ça et ça a plutôt bien marché malgré le luxe de précautions sociales exprimées par le Président: 15.000 postes supprimés dont 4,6 en France justifient bien quelques précautions….même si régler ce problème de sureffectifs est urgent, il est encore plus URGENT d’arrêter cette fuite continue des ventes Renault par un retour en force du Produit et on ne voit rien dans ce plan qui va dans ce sens, au contraire. Rien de nouveau dans les orientations données. Cela fait 20 ans qu’on cherche à développer les synergies; beaucoup ont été réalisées dans les échanges d’organes, moteurs, boites de vitesses, plateformes etc On cherche encore plus de standardisation, moins de diversité…mais comment réintroduire de la créativité, des innovations structurelles ou mécaniques au-delà de la connectivité qui polarise quasiment toute la recherche. Ces produits nouveaux qui ont construit l’image de Renault cités plus haut ne relevaient pas d’une technologie sophistiquée; chacun a été le fruit d’une recherche sur la façon de séduire le client à 10 ans. C’est la vision qui manque au nouveau Renault.
Contrairement à ce que veulent faire croire les esprits bien-pensants, le mythe automobile est encore bien vivant et c’est à la filière automobile d’entretenir la flamme au lieu de se couvrir de cendres !
Jacques CHEINISSE le 04/06/2020